Michel Audy

male
Date de naissance
1947
et lieu
Trois-Rivières
Canada
,
CA
Lives in
Trois-Rivières , QC
Canada
,
Quebec CA
Biographie

Réalisateur, scénariste. L’un des pionniers du cinéma queer québécois et originaire de Trois-Rivières, Audy a commencé à développer d’ambitieux projets de longs métrages en 8 mm, alors qu’il n’était encore qu’un adolescent fanatique des cinéclubs. Grâce à l’appui de Radio-Canada et de l’ONF, il a réalisé son tout premier en 16 mm, Jean François Xavier de… (1969), une méditation libre illustrant l’adolescence de garçons et de filles, confrontés aux restrictions imposées par la famille, la religion et, bien entendu, la mort. Le film s’est démarqué d’une part par son regard lyrique posé sur les jeunes hommes, habituellement nus dans une mise en scène sylvestre, et d’autre part par son combat contre les désirs sexuels tabous, illustré par un symbolisme ambivalent et des défis inintelligibles pour la famille et l’Église. Démoli par les critiques, Audy a tout de même persévéré pour réaliser en 1972, cette fois en 35 mm, Corps et âmes (1971). Ce dernier fut davantage éreinté par les critiques, malgré la décision d’Audy d’aller de l’avant avec un monde narratif plus conventionnel, mettant en scène des jeunes hommes adolescents liés de façon ambigüe avec une jeune femme. Le film traite de la perte, de la culpabilité, de trauma et, encore ici, de la mort. Toutefois, le désir, douloureux et non réciproque, est identifiable par tous les spectateurs queer. Nullement découragé, Audy, bien que frôlant la faillite personnelle, réalise un nouveau court métrage, La Maison qui empêche de voir la ville (1974), autre variante du triangle homme-homme-femme, dont le récit pessimiste aborde le trauma et la mémoire. Le film, dépeignant un magnifique autostoppeur et offrant de longues scènes d’intimité non consommée entre hommes (ils doivent se saouler pour s’enlacer, alors que leurs regards n’indiquent pas une telle inhibition), a difficilement survécu à ses avant-premières.

Audy s’est remis aux longs métrages au début des années 80, plongeant dans des projets subventionnés, axés sur l’éducation. Le plus connu est Luc ou la part des choses (Luc or His Share of Things, 1982, 90), un drame qui présente un mécanicien de 20 ans affirmant son identité sexuelle, dans le milieu populaire de Trois-Rivières. Ce captivant long métrage à petit budget explore cet homme en crise de découverte de soi, caractérisé par son intensité et son ingéniosité. Qui sait ce qu’il y a de plus surprenant entre le fait que le réalisateur entêté ait été en mesure d’aller chercher du financement pour son film dans le budget du ministère de l’Éducation, ou qu’il ait réussi à livrer un mélodrame tendre et constructif, joué de façon amatrice? Audy observe adroitement les infrastructures de la petite ville conformiste dont l’atmosphère est torride, l’amitié entre les hommes, la pression et les liens familiaux, le trauma lié à l’éveil sexuel, et enfin, le développement personnel, la gestion de la stigmatisation et la reconstruction identitaire. Luc comprend ses moments sexy, non seulement lors de la rencontre avec l’étranger, aux yeux bleus et à la barbe foncée, sur les berges d’une rivière où il s’est baigné nu, mais aussi dans la formation de liens entre ces amis torses nus en ces longues soirées suffocantes d’été. Une autre tragédie découlant de l’exode queer de ce milieu étouffant réside dans le côté sentimental du film, compensé par l’entêtement borné de sa classe ouvrière, un aspect unique et adorable qui ne se verbalise ni en anglais, ni en français.

Deuxième œuvre de la décennie, Crêver à vingt ans (Croaking at twenty, 1984) est un mélodrame fort déchirant sur la prostitution, qui ne fut ni distribué ni sous-titré. À la suite de quelques commandes du milieu de l’éducation, Audy a apparemment cessé de faire des films.